Examen de l’allégation :

Doc E2/04/17

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Notre conclusion

AUCUNE BASE SCIENTIFIQUE POUR CETTE ALLÉGATION

Les inconvénients d’une carence en vitamines et en minéraux sont suffisamment connus et acceptés. Éviter ces carences est essentiel et primordial pour rester en bonne santé.

Il n’existe aucune preuve scientifique permettant d’affirmer qu’une supplémentation en vitamines et en minéraux ne présente aucun avantage dans la lutte contre les maladies chroniques.

Celui qui prétend qu’il est prouvé qu’une supplémentation en vitamines et en minéraux ne sert à rien, s’appuie souvent sur une publication de 2013 parue dans Annals of Internal Medicine sous le titre “Stop wasting money on vitamin and mineral supplements”. (NdT : arrêtez de gaspiller votre argent en compléments de vitamines et de minéraux)  L’éditorial en arrive à la conclusion suivante “… supplementing the diet of well-nourished adults with (most) mineral or vitamin supplements has no clear benefit and might even be harmful. (NdT : donner une supplémentation à des adultes correctement nourris avec (la plupart) des compléments de minéraux ou de vitamines ne présente aucun bénéfice évident et peut même s’avérer néfaste)  These vitamins should not be used for chronic disease prevention. (NdT : ces vitamines ne doivent pas être utilisées pour la prévention de maladies chroniques). Enough is enough.” (NdT : trop c’est trop).

Par la suite, cette publication a été accueillie par une vague de protestations d’éminents scientifiques, spécialistes dans ce domaine. Un résumé accablant de ces critiques est disponible dans la respectable revue Nature (Moyer, 2014).  Voici une synthèse de ces critiques :

  • Les auteurs passent entièrement sous silence le fait que la population souffre encore en réalité de carences importantes qui ne sont pas visibles dans les études.  Généralement, les études utilisées pour leur analyse ont été réalisées sur des populations qui ne présentent aucune carence.
  • Cet éditorial repose sur les résultats de 3 études, et constitue une extrapolation sans fondement;
    • L’étude de Grodstein et al. (2013) a été réalisée sur des médecins allemands masculins bien alimentés de plus de 65 ans, avec une dose relativement faible d’une multivitamine et en mettant l’accent sur le ‘déclin cognitif’. Il est inconcevable d’extrapoler ces résultats à d’autres populations et à d’autres effets et ces résultats ne donnent aucune indication quant à l’utilité d’une supplémentation chez des personnes carencées.
    • L’étude de Fortmann et al. (2013) n’observe aucun effet d’une série de compléments sur les maladies cardio-vasculaires, le cancer ou la mortalité chez des personnes en bonne santé sans carences, mais indique également que, dans un certain nombre d’études de grande qualité, un effet protecteur significatif contre le cancer a été établi dans certains sous-groupes des études. Les auteurs préviennent également que le résultat ne s’applique pas à l’utilisation de nutriments chez des individus carencés ou à plus haut risque.
    • L’étude de Lamas et al. (2013) a été réalisée avec des multivitamines en guise de prévention secondaire contre les maladies athérosclérotiques – donc chez des patients qui avaient déjà eu un infarctus. On ne peut pas extrapoler ces résultats à la population générale.
  • Un certain nombre des études utilisées présentent des erreurs majeures dans leur conception et leur réalisation;
    • Une étude qui n’établissait aucun lien entre une supplémentation en calcium et en vitamine D’une part et les fractures d’autre part, semblait après coup présenter une erreur dans le calcul de l’apport quotidien en calcium (NIH Women’s Health Initiative, Prentice et al., 2013).
  • Une série d’études présentent des effets manifestes pour des sous-groupes, qui ne sont toutefois plus visibles dans la population totale testée;
    • Une étude qui n’établissait aucun lien entre le développement d’un adénome colorectal et une supplémentation en bêtacarotène semblait néanmoins démontrer une réduction significative du risque d’un tel cancer chez les non-fumeurs et les non-buveurs (Baron et al. 2003).
    • Une méta-analyse du lien entre supplémentation en antioxydants et cancer ne semblait pas montrer de rapport mais cette étude n’a pas établi de distinction entre les hommes et les femmes. Cependant, un lien était bel et bien visible chez les hommes (Hercberg et al., 2004).
    • Une étude réalisée à la Harvard School of Public Health chez 672 professionnels de la santé ayant des antécédents de tumeurs colorectales bénignes (un facteur de risque pour le cancer du côlon) qui prenaient un complément d’acide folique n’a prouvé aucun effet si l’on regardait l’ensemble de la population mais chez les personnes qui avaient le plus faible apport en acide folique au début, on a constaté un risque réduit de rechute (Wu et al. 2009).

Nous pouvons donc affirmer avec autant de facilité : Il n’existe aucune preuve scientifique permettant d’affirmer qu’une supplémentation en vitamines et en minéraux ne présente aucun bénéfice.

Références

  • Baron JA, Cole BF, Mott L, Haile R, Grau M, Church TR, Beck GJ, Greenberg ER. Neoplastic and antineoplastic effects of beta-carotene on colorectal adenoma recurrence: results of a randomized trial. J Natl Cancer Inst 2003; 9:717-722.
  • Fortmann SP, Burda BU, Senger CA, Lin JS, Whitlock P. Vitamin and Mineral Supplements in the Primary Prevention of Cardiovascular Disease and Cancer: An Updated Systematic Evidence Review for the U.S. Preventive Services Task Force”.  Annals of Internal Medicine 2013; 159(12):824-34.
  • Grodstein F, O’Brien J, Kang JH, Dushkes R, Cook NR, Okereke O, Manson JE, Glynn RJ, Buring JE, Gaziano JM, Sesso HD. A Randomized Trial of Long-Term Multivitamin Supplementation and Cognitive Function in Men: The Physicians’ Health Study II. Ann Intern Med 2013; 159(12): 806-814.
  • Hercberg S, Galan P, Preziosi P, Bertrais S, Mennen L, Malvy D, Roussel AM, Favier A, Briançon S.Arch. The SU.VI.MAX Study: a randomized, placebo-controlled trial of the health effects of antioxidant vitamins and minerals.. Arch. Intern Med 2004; 164(21):2335-42.
  • Lamas GA, Boineau R, Goertz C, Mark DB, Rosenberg Y, Stylianou M, Rozema T, Nahin RL, Lindblad L, Lewis EF, Drisko J, Lee KL. Oral High-Dose Multivitamins and Minerals or Post Myocarcial Infarction Patients in TACT. Ann Intern Med 2013; 159(12):797-805.
  • Moyer MW. Vitamins on Trial. Nature 2014; 510: 462-4.
  • Wu K, Platz EAWillett WCFuchs CSSelhub JRosner BAHunter DJGiovannucci E. A randomized trial on folic acid supplementation and risk of recurrent colorectal adenoma. Am J Clin Nutr 2009; 90: 1623-1631.
  • Prentice RL, Pettinger MB, Jackson RD, Wactawski-Wende J, Lacroix AZ, Anderson GL, Chlebowski RT, Manson JE, Van Horn L, Vitolins MZ, Datta M, LeBlanc ES, Cauley JA, Rossouw JE. Health risks and benefits from calcium and vitamin D supplementation: Women's Health Initiative clinical trial and cohort study. Osteoporos Int 2013; 24(2):567-80.